Le substitut du procureur, Eric Iverson, a tenté mardi 22 août 2012 de contrer les propos de l’officier français, qui affirme que Jean-Pierre Bemba n’avait pas le contrôle sur les troupes du Mouvement pour la libération du Congo (MLC), envoyées en renfort au président Ange-Felix Patassé, menacé, en 2002 et 2003, par les rebelles de François Bozizé.
L’audition de l’expert Jacques Seara, premier témoin appelé par la défense de Jean-Pierre Bemba, se poursuivait ainsi devant la Cour pénale internationale (CPI) avec le contre-interrogatoire du procureur.
Les combattants de l’Armée de libération du Congo (ALC, bras armé du MLC), envoyés en Centrafrique par l’accusé n’étaient « pas sous le commandement et le contrôle opérationnel de Monsieur Bemba, mais aux ordres des autorités centrafricaines », a de nouveau asséné le témoin, ajoutant qu’il « était normal qu’ils fassent des rapports quotidiens » à Gbadolite, QG de Jean-Pierre Bemba en République démocratique du Congo (RDC), puisqu’ils conservaient « néanmoins leur appartenance à l’ALC».
Lors de son interrogatoire, l’expert avait affirmé qu’il était impossible de commander une force à plusieurs milliers de kilomètres de distance. « Si on suit votre raisonnement, les commandants de l’Otan déployés à Bruxelles n’ont aucune possibilité de contrôle sur leurs troupes en Afghanistan ? », a demandé le procureur. « Vous parlez d’une guerre de 2012, qui n’a rien à voir avec la situation en République Centrafricaine où on est dans un conflit de fantassins », a rétorqué le témoin.
« Mais il [Jean-Pierre Bemba] avait des moyens, il avait un Turaya [téléphone satellitaire], le colonel Mustafa aussi. Alors pourquoi tirez-vous ces conclusions ? » a encore interrogé Eric Iverson. « Il n’était pas informé en temps réel et n’avait pas toutes les informations qu’il faut pour commander. A Gbadolite, il ne pouvait pas être au courant » de la position des forces, de la situation du terrain. « Le colonel Mustafa était sur le terrain, il possédait tous les éléments nécessaires à la prise de décision. C’est le colonel Mustafa qui commandait la force sur le terrain », a de nouveau répété le général Seara.
Le procureur s’est aussi étonné qu’il n’y ait eu aucun accord écrit, entre les forces centrafricaines et le MLC sur les « formalités d’engagement ». « Je n’ai vu aucune trace d’un document traitant de ce sujet », a signalé l’expert.
Le procès pour crimes contre l’humanité intenté contre Jean-Pierre Bemba a débuté en novembre 2010. La défense a commencé a présenté ses preuves le 14 août et dispose de huit mois pour appeler ses 63 témoins à la barre.