La situation actuelle que traverse la ville de Bouar oblige certaines organisations du système des Nations unies à quitter la ville. L’équipe du Bureau Intégré des Nations Unies pour la Consolidation de la Paix en Centrafrique (BINUCA) et celle du Programme Alimentaire Mondial (PAM) sont parties ce mardi pour Bangui. Les personnels de certaines organisations non gouvernementales humanitaires telles que Mercy Corps et Merlin, eux aussi, évacuent la ville. Cette situation met la population de Bouar dans l’inquiétude. L’un des membres du personnel de l’ONG Cordaid interrogé, regrette le départ précipité de ses confrères humanitaires qui abandonnent la ville au moment où celle-ci à besoin d’eux. Pour l’instant, on note encore la présence de l’ONG Maison de la Société Civile et du Développement Local et l’ONG Cordaid.
La population décide cette fois de trouver refuge en brousse et à l’extérieur de la ville. Ce mardi, de nombreuses personnes ont pris la route vers la frontière centrafricano-camerounaise. La paisible population est ainsi abandonnée à son triste sort à cause de l’absence des autorités locales qui sont parties depuis le début des hostilités. Malgré la forte présence des éléments de la FOMAC basés à Bouar pour la sécurisation des personnes et des biens, la peur règne au sein de la communauté civile. Les rumeurs qui circulent sont la cause des déplacements massifs de la population.
Mais déjà le bilan provisoire de l’attaque de la ville de Bouar est donné par le commandant Algoni Moussa Mamazen, porte parole du commandant de zone de Bouar. Il a affirmé avoir fait subir aux éléments des « anti-balaka » une perte consécutive dans leur rang lors de la dernière attaque de samedi dernier en plein centre ville de Bouar, chef lieu de la Nana Mambéré.
Le commandant Algoni Moussa Mamazen confirme que leur base a été attaquée. « Ces assaillants nous ont attaqué sur trois colonnes, les échanges de tirs ont été nourris. Leur présence nous a été signalée à 30 Km de Bouar et qu’ils attaqueraient la base militaire le samedi. Or depuis jeudi, ils s’étaient cachés à l’ancienne gendarmerie pour nous attaquer le samedi de 8h 14mn à 10h 25mn. Le chef d’Etat Major de leur opération, François Bobassa, son fils et son cadet sont décédés sur le champ de bataille. Sur place, nous avons dénombré 17 morts dans leur rang. Au sein de notre force, nous avons enregistré deux (2) décès et trois (3) blessés parmi lesquels le capitaine Mahadji, le sergent Saïdou et moi-même commandant Algoni Moussa. Les assaillants ont fait usage des armes lourdes RPG7, DKM, des armes d’assaut notamment les Kalachnikov et des armes de marque artisanale ».
Le Lieutenant Hubert Mbaïnani, Major à l’infirmerie du Camp Leclerc précise que les agresseurs en armes, assimilés aux « anti-balaka », ont été repoussés. « Les ‘anti-balaka’ sont venus attaquer la base, mais grâce aux éléments sur place, ceux-ci ont pu être repoussés jusqu’à une distance d’environ 500 mètres et les assaillants ont pris fuite. Dans notre camp, il y a eu deux morts et trois blessés. Du côté des assaillants, on compte plusieurs morts et plusieurs blessés ».
Les affrontements entre « anti-balaka » et forces de défense et de sécurité le samedi dernier dans cette ville ont fait près de 5000 déplacés. Ces personnes se sont réfugiées notamment à la Cathédrale Marie Mère de l’Eglise, aux séminaires Saint Laurent, Saint Elie et la Yolé. Pour le moment la situation humanitaire des personnes déplacées se dégrade progressivement et nécessite une aide d’urgence.
Le Père Toussaint Zoumaldé du Grand séminaire Saint Laurent et Directeur de Radio Siriri, joint au téléphone par RNL, explique que la situation devient délicate. « La Cathédrale Marie Mère de l’Eglise a accueilli depuis samedi plus de deux mille (2000) personnes. Le grand séminaire Saint Laurent a abrité de samedi à aujourd’hui plus de 1.400 personnes. La psychose générale s’est installée dans la ville. Compte tenu de cette crise, certaines personnes n’ont pas mangé depuis de deux ou trois jours. Il y a des personnes de 3ème âge, des mères allaitantes, des enfants de bas âge de zéro à 5 ans dont le nombre dépasse 100 à 150 ».
Il affirme par ailleurs que ces déplacés internes ont besoin d’une aide d’urgence, car beaucoup manquent de nourriture et n’ont aucune couverture sanitaire. « Le PAM a fait un tour à la Cathédrale et à Saint Laurent pour évaluer la situation. Il faut une aide d’urgence dans l’immédiat. Du point de vu sanitaire, c’est difficile en ce moment. A la Cathédrale, une organisation s’est mise en place à travers un groupe de secouristes. Mais du côté de Saint Laurent, rien n’est encore fait. Le couvent essaie de mettre à la disposition des déplacés le peu de médicaments dont il dispose pour les étudiants, mais nous sommes en rupture de stock. Il va falloir que la Croix Rouge intervienne parce qu’il y a de sérieux problèmes de santé ».
Notons que la situation est du moins calme dans la ville de Bouar depuis dimanche matin. Le Père Toussaint Zoumaldé a précisé que pour le moment, « les personnes déplacées ne peuvent pas être forcées de rentrer chez elles, car elles sont encore traumatisées. La majorité sont des déplacés de Bohong » et des personnes en provenance de Bangui, elle-même ayant, vécu les situations de Boy rabe, Gobongo et Boeing, a-t-il ajouté.