Regain de tension à Bangui. Des musulmans du Km 5, dans le 3ème arrondissement, ont ouvert le feu mercredi tout le long de l’avenue Barthélémy Boganda, dans le 3ème, pour venger la mort d’un présumé ex-Séléka tué la veille. Bilan : au moins sept morts, selon des sources associatives locales.
La victime ex-Séléka avait été lynchée à mort mardi soir par une foule au milieu de laquelle elle venait de jeter une grenade, à la sortie nord de Bangui, selon des témoins. Le corps a été brûlé et abandonné sur la route.
« Les choses se sont passées au niveau du Bar Pk 9 aux environs de 18 heures. Un homme a dégainé une grenade et tout le monde a commencé à crier », a relaté un habitant, soulignant que l’explosion a fait plusieurs blessés. « Ce que nous savons, c’est que l’acte a été posé par un ex-Séléka que nous avons tué et brûlé », a ajouté le témoin.
Pour venger cet ex-Séléka, des musulmans ont pris des armes mercredi, détruisant des maisons et s’attaquant aux habitants le long de l’avenue Boganda.
« Ce mercredi autour de 9 heures, nous avons entendu des coups de feu au KM 5. Il nous a été rapporté qu’hier soir, un homme a été tué au niveau de Gobongo. Par après, c’est une foule de musulmans qui a pris la direction du siège de la Minusca. Les tirs ont encore retenti. Du coup, les manifestants ont saccagé et brûlé tout aux abords de l’avenue Boganda sans être inquiétés », a raconté mercredi un témoin selon lequel plusieurs personnes ont été tuées et des maisons brûlées.
Selon un bilan provisoire publié jeudi par la Croix Rouge Centrafricaine (CRCA), une organisation de la place, au moins sept personnes ont été tuées et 25 autres blessées.
L’ « ambassadeur de la paix » du Km 5, Ahamat Ali, a appelé ses coreligionnaires à la raison. « Nous avons réceptionné un corps brûlé et mutilé ce matin au KM 5. Les jeunes en colère ont pris les armes pour tirer des coups en l’air. Certains en ont profité pour se lancer dans des actes de vol. J’appelle les musulmans à cultiver l’esprit de tolérance et à garder le calme », a-t-il demandé.
Abondant dans le même sens, la Coordination des organisations musulmanes de Centrafrique (COMUC) a condamné ces actes orchestrés, selon elle, par un groupuscule en dérapage. « Ce n’est pas du tout normal de répondre à la violence par la violence. Ce que nous avons, en tant que société civile musulmane, déploré depuis longtemps. Nous condamnons fermement ces actes », a déclaré le chargé d’administration au sein de la COMUC, Abdoulaye Ninguia, joint mercredi au téléphone par RNL.
Pour sa part, la Ligue centrafricaine des droits de l’Homme (LCDH) juge le climat actuel très préoccupant. « La situation m’inquiète, ça préoccupe énormément la LCDH. Toute la nuit de mercredi, il y a eu des tirs jusqu’à ce matin, la circulation est bloquée et nous ne pouvons pas avoir à l’heure actuelle le bilan exact des dégâts et des meurtres qui ont été commis pendant cette période de 48 heures », a confié à RNL le président de la Ligue, Joseph Bindoumi.
Maître Bindoumi a par ailleurs dénoncé la passivité de la communauté internationale.
Même sentiment d’indignation de la part du pasteur Nicolas Guérékoyamé-Gbangou, président de l’Alliance des évangéliques en Centrafrique (AEC). Pour lui, ces actes sont le fait d’individus sans conscience et sans aucun sens de responsabilité.
« Je crois qu’il est de la responsabilité de la présidente de convoquer le plus rapidement possible une concertation de tous les acteurs sociopolitiques pour essayer d’inventer ensemble avec la communauté internationale une sortie de crise », a demandé le pasteur Guérékoyamé-Gbangou.
Contactée mercredi, la force ces Nations unies en Centrafrique (Minusca) s’était refusée à tout commentaire. Certaines sources à Bangui affirment que le contingent marocain de la Minusca et les soldats français de l’opération Sangaris ont laissé les hommes armés, en provenance du Km 5, ouvrir le feu et exposer le corps brûlé devant le portail de la représentation onusienne.