Deuxième jour du procès de Jean-Pierre Bemba à la Cour Internationale de la Haye en ce 23 novembre 2010. A la reprise de l’audience, le Procureur doit présenter son premier témoin.
Le procès intenté contre l’ancien vice-président congolais et chef de guerre s’est ouvert le 22 novembre 2010 devant la CPI. A l’ouverture de l’audience, l’accusé a salué ses partisans et sa femme, présents dans la galerie du public. Jean-Pierre Bemba a ensuite plaidé « non coupable » des crimes contre l’humanité et crimes de guerre dont l’accuse le procureur.
Présent à l’ouverture du procès, le procureur Luis Moreno Ocampo a rappelé les charges, en insistant sur les viols commis par les soldats du Mouvement pour la Libération du Congo (MLC) en Centrafrique, en 2002 et 2003. « Les femmes et les filles ont été violées, quel que soit leur âge (…) Des viols commis en public, sous le regard de leurs familles», a-t-il précisé.
Les soldats de Jean-Pierre Bemba avait été appelés par Ange-Félix Patassé en octobre 2002, pour renforcer son armée, confrontée à la rébellion conduite par le général François Bozizé, aujourd’hui au pouvoir.
L’accusation poursuit le président du Mouvement pour la Libération du Congo (MLC) en qualité de supérieur hiérarchique. Jean-Pierre Bemba n’était pas sur la ligne de front, il n’a pas ordonné les crimes, mais il aurait du empêcher et punir ses soldats, a déclaré en substance le procureur.
Jean-Pierre Bemba a aussi « institutionnalisé le pillage ». « Les biens pillés par les soldats, non payés, étaient ensuite transportés au Congo, a-t-il précisé, les civils qui résistaient aux viols et au pillage étaient tués ».
Selon le substitut, Petra Kneuer, « il n’a pas puni ces crimes, parce qu’ils répondaient à ses objectifs ». Après la mort du maréchal Mobutu et l’arrivée au pouvoir de Laurent-Désiré Kabila à la tête de la République démocratique du Congo (RDC), Jean-Pierre Bemba s’était engagé dans la lutte armée et avait créé, en 1998, le Mouvement pour la libération du Congo, considéré aujourd’hui comme l’un des principaux partis d’opposition à Kinshasa. Pour le procureur, « Jean-Pierre Bemba avait besoin d’alliés en Centrafrique » et le président Ange-Félix Patassé comptait parmi ceux là.
Après le procureur, les deux représentants des victimes ont pris la parole. Maitre Marie Edith Douzima-Lawson (notre photo) a affirmé que « les attentes sont grandes pour ces victimes, atteintes dans leur chair ». De nouvelles victimes ont été admises et pourront elles aussi être représentées dans cette affaire. Elles sont aujourd’hui 759. Cette présence leur donne le droit d’intervenir dans le procès, dans des conditions définies par les juges. Elles ne peuvent, par exemple, pas conduire de témoin à la barre, mais elles peuvent en revanche plaider leur cause.
Si Jean-Pierre Bemba devait être condamné au terme de ce procès, qui devrait durer plus d’un an, elles auront aussi la possibilité de demander des réparations.
L’avocat principal de l’accusé, maître Nkwebe Liriss, a refusé de « répondre aux victimes », a-t-il déclaré dès le début de sa plaidoirie, « parce que je ne réponds pas sur la base d’émotions mais je réponds sur la base de preuves ». L’avocat du Barreau de Kinshasa a ensuite rejeté les accusations sur d’autres, plus responsables à ses yeux et reproché au procureur de ne présenter qu’un seul homme dans le box des accusés. « Plusieurs autres commandant centrafricains ne sont pas là, c’est pourtant eux qui ont conduit cette guerre » a-t-il déclaré, tandis que Jean-Pierre Bemba se trouvait « à plus de 2000 kilomètres des combats ».