Le secteur éducatif centrafricain connait depuis plus d’une décennie des difficultés de tout genre. De l’enseignement secondaire en passant par le supérieur, le constat reste le même. Beaucoup d’étudiants se plaignent de la qualité de l’enseignement qu’ils reçoivent suite à d’énormes difficultés auxquelles font face ces établissements d’enseignement publics. C’est dans ce cadre que des dysfonctionnements graves ont été observés à l’Ecole normale supérieure (ENS). Les étudiants pointent du doigt certains enseignants et d’autres personnalités du fait de la gestion non orthodoxe des ressources humaines et financières de cette institution.
Plusieurs difficultés entravent la bonne marche de cette unique école publique de formation d’enseignants du secondaire. La formation au rabais des futurs enseignants, la disparition de documents administratifs et des retards chroniques dans les évaluations de fin d’année, illustrent ce mauvais fonctionnement.
Quelques étudiants et enseignants dénoncent le dernier recrutement des élèves professeurs qui ne « s’est pas fait et selon dans la transparence les exigences ». Des cas de « fraudes » ont été enregistrés lors du concours d’admission en octobre 2019. En illustration, quelques candidats, arrivés en retard lors de la composition de certaines matières, ont été renvoyés de la salle. Force est de constater que lors de la proclamation des résultats, leurs noms figuraient parmi les admis. Les étudiants se plaignent également du fait, qu’après la formation théorique de la première année de Master d’aptitude de l’enseignement du second degré, (MAPES), les élèves professeurs ne peuvent pas avoir leurs relevés de notes. En conséquence, ils sont confrontés à d’énormes difficultés pendant leur inscription en 2ème année car le service de scolarité de l’Université de Bangui rejette tout dossier dépourvu de relevé de notes. Par conséquent, ils ne peuvent pas demander leurs diplômes de fin de formation.
Deux choses sont à l’origine du problème. Tout d’abord, le manque de quelques procès-verbaux de soutenances. Ensuite, la difficulté de concevoir la maquette de relevés selon le système LMD. Malgré l’intervention des enseignants pour confirmer les notes, l’administration s’y oppose. Elle demande, par contre, aux intéressés de reprendre ces disciplines. Le directeur reconnait que les étudiants avaient rejeté en bloc les relevés de notes délivrés car il y manquait les cases réservées à la moyenne générale et à la mention.
« Ce n’est pas de la faute des étudiants, la responsabilité incombe à l’administration qui a failli à ses obligations » affirme Oumarou Sanda Abo, Directeur de l’Ecole normale supérieure.
Les collaborateurs du directeur lui auraient proposé des maquettes LMD qu’il n’en avait pas tenu compte, version qu’il balaie du revers de main affirmant qu’il a essayé de l’appliquer. Il ajoute par ailleurs que les tableaux de répartition des travaux de mémoires affichés le lendemain de la cessation de grève des enseignants vacataires ont bouleversé tout le travail abattu depuis plusieurs mois. Cela a suscité une vive réaction des étudiants et enseignants. Il justifie ce retard par la grève déclenchée le 10 février dernier. En conséquence, certains étudiants réaffectés n’ont pas de directeur de mémoire.
En l’absence du service de l’intendance, les responsables se servent comme à « la comptabilité libanaise ». Cette situation pose un problème de gouvernance au sein de cette institution. La démission du directeur des études, Frédéric Bamado a aussi fragilisé le bon fonctionnement de l’administration. Ce dernier reproche à ses anciens collaborateurs de l’avoir mis à l’écart de grandes décisions voire de la gestion de l’institution.
Les étudiants et certains enseignants appellent les autorités du pays à intervenir urgemment pour sauver l’Ecole normale supérieure « au bord du gouffre ».