Secouée par des crises politiques et sécuritaires récurrentes depuis des décennies, la République centrafricaine, a décidé de renoncer définitivement à la violence et de repartir sur la voie de la paix et du développement. Le gouvernement centrafricain, avec le concours de la communauté internationale notamment des pays de la sous-région, a pu signer un accord de paix et de réconciliation avec les 14 groupes armés du pays. Cependant, plus d’une année après la signature de cet accord pour la paix, sept d’entre eux décident de se retirer des activités du gouvernement.
Quatorze mois après la signature à Khartoum au Soudan, de l’Accord politique pour la paix et réconciliation (APPR), le torchon brûle entre le gouvernement centrafricain et certains groupes armés signataires du document. Six groupes armés parmi les quatorze signataires ont décidé de suspendre leur participation dans le gouvernement et dans les différents organes de la mise en œuvre de cet accord. Cela fait suite à la publication d’un communiqué de quatre pages, où les leaders de ces groupes armés, ont formulé un certain nombre de remarques à l’endroit du gouvernement. Pour ces derniers, le gouvernement n’a pas honoré ses engagements dans le cadre de cet arrangement politique. Tout d’abord, ils dénoncent l’arrestation de seize éléments, ex-Antibalaka, le 28 mars 2020 au domicile du ministre du tourisme Dieudonné Ndomaté, coordonnateur adjoint de ce mouvement; suivie de leur incarcération au camp de Roux et à la Maison centrale de Ngaragba. Détention qu’ils qualifient d’« anormale ». Selon eux, ces ex Antibalakas s’étaient rendus chez le ministre Ndomaté pour échanger sur les activités menées dans le cadre de la mise œuvre de l’accord notamment l’harmonisation des grades. Par ailleurs, ces groupes armés déplorent le retard dans la mise en place de la commission chargée de l’intégration et de la réintégration des leaders ainsi que des éléments des groupes armés au sein des forces de défense et de sécurité ou dans la fonction publique. Ils critiquent également, la lenteur dans l’opérationnalisation de la Commission Vérité, Justice Réparation et Réconciliation (CVJRR). Pour eux, « le président Faustin Archange Touadéra et son gouvernement n’ont pas su saisir l’opportunité qu’offre l’accord pour sortir le pays de la crise« .
» Le président de la République excelle dans les violations de l’APPR-RCA », mentionne leur communiqué conjoint. A cet effet, ils exigent la libération des prisonniers politico-militaires, détenus à Ngaragba et au camp de Roux. La restructuration et la refondation des Forces de sécurité et de défense « afin que celles-ci soient au service de la Nation, au lieu d’une personne ». Ils exigent également que ces questions de restructuration et de la refondation des porteurs de tenues soient discutées avec les groupes armés signataires de l’accord du 6 février 2019.
Dans ce document, paraphé par sept leaders de groupes armés notamment, Martin Koumtamadji, alias Abdoulaye Miskine du FDPC, Dieudonné Ndomaté du Mouvement Antibalaka aile Ngaissona, Alkatim Mahamat du MPC, Husseini Akacha de la Séléka rénovée, Ali Darassa de l’UPC, Noureidine Adam du FPRC et Abas Sidiki des 3R, les signataires décident de suspendre leur participation au gouvernement et dans les organes de mise en œuvre de l’Accord. Ils appellent enfin les garants et facilitateurs à prendre leur responsabilité conformément à l’article 34 de cet Accord. Cependant, alors que Dieudonné Ndomaté des Antibalaka reconnait avoir signé le document, Abbas Sidiki des 3R dont le nom figure en bas du communiqué, ne s’y reconnait pas.
« Ce n’est pas ma signature. Je ne m’y reconnais pas, si je veux signer quelque chose, c’est avec ma main et non sur ordinateur. Personne ne m’a demandé mon avis sur cette question. Je n’en sais rien », déclare le chef des 3R joint par Radio Ndeke Luka.
Le gouvernement pour sa part qualifie de manipulation, ce communiqué qui ne fait pas l’unanimité. Selon Ange Maxime Kazagui, ministre de la Communication et Porte-parole du gouvernement, Abbas Sidiki des 3R, Ali Darassa de l’UPC et Mahamat Alkatim du MPC affirment ne pas se reconnaître dans la signature du document.
» Je ne voudrais pas commenter autre mesure un document qui serait cacheté du sceau du manque de crédibilité. Quant à certains des signataires supposés, y en a un qui est encore en prison au Tchad, je ne sais dans quel contexte il aurait pu signer un tel document », commente M. Kazagui pointant du doigt une manipulation sur certains contenus dudit document. Le ministre porte-parole du gouvernement a par ailleurs rappelé que sur 100% de ses engagements, le gouvernement en a honoré au moins 80%, chose que certains signataires de l’accord du 6 février 2019 n’ont pas fait.
Cet épisode surgit, au moment où l’actualité politique est dominée par un projet de modification partielle de la Constitution du 30 mars 2016 en vue de la prorogation des mandats présidentiel et législatif du fait de la « pandémie du Covid-19 ».