Depuis quelque temps, un phénomène nouveau et inhabituel s’installe dans certains lieux de prière à Bangui. Dans des églises et cellules de prière dites de réveil, des objets et produits comestibles sont vendus aux fidèles sous prétexte qu’ils sont sources de guérison, de délivrance spirituelle ou encore de miracles. Cette pratique décriée par certains Centrafricains prend de l’ampleur et est à l’origine de nombreuses confusions dans des familles.
C’est un phénomène qui prend de l’ampleur dans des lieux de cultes à Bangui et ses environs. Tel est le cas au quartier Kpéténé 5 dans le 6e arrd de Bangui. Non loin du quartier général de la Minusca, juste en face du pont Kpéténé, se trouve la « Maison mère », un ancien bar dancing transformé en cellule de prière. Il ne s’agit pas d’un lieu de prière ordinaire. Là, le responsable est plus qu’un prédicateur. Il est consulté par toute personne en quête de solution à ses problèmes.
Juste à l’entrée, une jeune dame accueille les personnes qui viennent consulter l’oracle. « Etes-vous là pour la consultation ? Vous payez 1000 francs CFA », dit-elle au reporter de Radio Ndeke Luka.
« Tout ce que nous faisons est biblique »
Après trois quart d’heures d’attente dans la file, Daniel Mboyo, un ressortissant de la République Démocratique du Congo, responsable de cette cellule de prière, reçoit Radio Ndeke Luka. Il propose à ses visiteurs une gamme de produits de miracle, de délivrance et de guérison. On y trouve des bouteilles de jus, des sachets d’eau pure et de petits flacons d’huile. Ces objets sont vendus entre 1000 F et 25000Fcfa. Des prix qui varient en fonction du degré du problème. Cette pratique est-elle biblique ?
« Tout ce que nous faisons est prescrit par les saintes écritures. Si nous lisons l’épitre de Jacques 5 verset 14, il est clairement dit : Quelqu’un parmi vous est-il malade ? Qu’il appelle les anciens de l’Eglise, et que les anciens prient pour lui, en l’oignant d’huile au nom du Seigneur « , répond le prédicateur.
Tous les jours, ce ressortissant de la RDC reçoit des dizaines de visiteurs dont la plupart sont des femmes. Il se fait des dizaines de milliers de francs CFA par jour.
Des marchands de miracles
Dans le 7e arrondissement de Bangui, se trouve la « Cité des miracles », une église de réveil où le miracle est le maître mot. En dehors des prédications, l’Apôtre Constant Tchimanda, le responsable, est consulté tous les lundis, mercredis et vendredis. Dans son bureau, des dizaines de personnes venues de tous les coins de la capitale exposent leurs problèmes. Comme remède, l’homme de Dieu propose des bouteilles d’eau, du sel et de l’huile avec un prix allant de 5000 à 10 mille Francs CFA. Il affirme même avoir délivré et guéri plusieurs patients atteints du Vih-Sida. La preuve, son étagère est remplie d’Antirétroviraux (ARV) que les malades ont abandonnés.
« L’évangile est gratuit mais l’évangélisation ne l’est pas et c’est soutenu bibliquement. Les gens qui parlent n’ont pas la sagesse des choses et ils bavardent inutilement. Je n’ai pas à m’expliquer sur quoi que ce soit car je suis un oint de Dieu », se justifie l’Apôtre Constant Tchimanda.
Le ministère de l’Administration du territoire promet des mesures
La plupart de ces lieux de prière et de miracles qui envahissent progressivement la ville de Bangui ne sont pas reconnus par l’Etat. Un sujet de préoccupation pour le ministère de l’Administration du territoire qui assure en avoir déjà fermé près d’une quarantaine.
« Le département a déjà pris des dispositions et nous en avons fermé plus de 35 de ces cellules de prière. Ces lieux de culte sont dirigés par des pasteurs voleurs de brebis qui n’ont pas de référence biblique. Ils n’ont pas de caution théologique. La plupart de ces églises nous sont importées d’autres pays et dans lesquelles la pratique de la magie noire est visible. Nous nous sommes rendus compte de cette situation là et cela ne se fera pas sans accident », prévient David Gbeti, directeur de cabinet du ministre de l’Administration du territoire.
Bouteilles de jus, sachets d’eau pure, bouteilles d’eau minérale, sel ou encore flacons d’huile, les objets proposés par ces prédicateurs commencent à inquiéter les Centrafricains. Selon nos investigations, la plupart de ces lieux de prière ne sont pas reconnus par l’Etat et sont sources de confusions dans les familles. Plusieurs couples se sont séparés à cause des prophéties ou des prédications données par ces hommes et femmes qui se disent des prédicateurs de la parole de Dieu.