Quelques jours après l’éviction de Danièle Darlan à la tête de la Cour constitutionnelle, le président de la République brise le silence. En marge d’une rencontre, ce 28 octobre 2022 à Bangui, avec les ambassadeurs et chefs de missions diplomatiques accrédités dans le pays, Faustin-Archange Touadéra s’est longuement penché sur la crise à la Cour constitutionnelle. Pour lui, la mise à la retraite du juge l’empêche de poursuivre tout autre fonction au sein de l’administration publique.
« L’administration, se fondant sur l’esprit de la Constitution, de la Loi portant Statut Général de la Fonction Publique et de la Loi portant Statut particulier de la Magistrature de l’Ordre judiciaire, a estimé que la mise à la retraite d’un fonctionnaire rendait juridiquement impossible la poursuite d’une fonction ou d’un mandat ne résultant pas d’une élection au suffrage universel direct », a précisé Faustin-Archange Touadéra dans son allocution devant les ambassadeurs.
Pour le chef de l’Etat, « Il ne s’agit pas d’un règlement de compte », et de renchérir, « L’application d’une loi, d’ailleurs impersonnelle, ne doit pas être analysée comme une mesure de représailles. Nous savons tous que les décisions de la Cour constitutionnelles sont rendues de manière collégiale dans le respect du secret des délibérations. Aucun juge constitutionnel ne peut être rendu seul responsable d’une décision de la Cour ».
« L’inamovibilité impose aux juges de préserver leur indépendance »
« Je tiens à préciser que la mise à la retraite n’est ni une poursuite, ni une arrestation, ni une atteinte à l’indépendance, ni une mutation d’office d’un juge constitutionnel, moins encore une démission forcée sans autorisation de la Cour constitutionnelle. Il faut également rappeler que l’inamovibilité, garantie essentielle de l’indépendance des juges, leur impose de préserver leur indépendance vis-à-vis du pouvoir exécutif » a fait savoir Faustin-Archange Touadéra, président de la République.
Par ailleurs, le chef de l’Etat centrafricain s’est questionné sur les relations entre la Cour constitutionnelle et les partis politiques de l’opposition. Relations, selon lui, pouvant impacter l’indépendance de l’institution.
« Cette déclaration d’amour a alimenté le doute de nos concitoyens »
« Malheureusement, nous avons observé que dans une déclaration sur l’Etat de droit et l’indépendance de la justice, publiée avant sa décision 23 septembre 2022, la Cour constitutionnelle a remercié les entités politiques, la société civile, des individus et des requérants regroupés au sein du Bloc républicain pour la défense de la Constitution, pour les soutiens collectifs que ceux-ci lui ont apportés. Cette déclaration d’amour entre la Cour constitutionnelle et l’opposition démocratique a alimenté le doute de nos concitoyens » a lâché le chef de l’Etat.
Pour Faustin-Archange Touadéra, « La passation de service entre le président sortant et le vice-président de la Cour constitutionnelle clos définitivement les débats sur cette question ». Il indique aussi que la Cour constitutionnelle continuera à fonctionner comme les autres institutions de la République, en toute indépendance et avec tout son soutien.
Si après la publication du décret mettant fin au mandat du président de la Cour constitutionnelle, le Bloc républicain pour la défense de la Constitution a appelé la communauté internationale à suspendre toute coopération avec la République centrafricaine, l’objet de cette rencontre avec les ambassadeurs est de leur transmettre un message clair : « Vous êtes témoins de l’irréversible marche du peuple centrafricain vers la paix, la sécurité, la cohésion sociale, la réconciliation nationale, le relèvement économique et la construction de l’Etat de droit. Je vous exhorte à plus de fidélité dans les rapports que vous envoyez à vos pays ou organisations respectifs », a conclu le chef de l’Etat centrafricain.