L’absence de cimetière à Bangui est un véritable casse-tête pour les familles qui n’ont pas de ferme. En cas de disparition d’un parent, beaucoup de familles ne savent où inhumer le corps faute de lieu approprié. Souvent, l’initiative d’enterrer les corps à domicile ou au champ crée des tensions entre voisins car Bangui est une ville sans cimetière.
Août 2023, un samedi, à la morgue de l’hôpital communautaire de Bangui, certaines familles s’apprêtent à lever les corps de leurs parents. La question du lieu de l’inhumation est au centre des échanges au sein de l’assistance.
L’enterrer dans la ferme de notre grand-père
« Nous sommes venus pour la levée du corps de notre grand-frère. Comme il y a un manque de cimetière à Bangui, nous serons obligés d’aller l’enterrer dans la ferme de notre grand-père à Bobangui (Ndlr : préfecture de la Lobaye) », déplore Naomie, proche d’un défunt.
Naomie et sa famille ne sont pas les seules à être confrontées à cette difficulté. De nombreuses autres personnes présentes au hall de la morgue déplorent l’absence d’un cimetière public dans la capitale.
Problème de santé publique
« Le gouvernement a fermé le cimetière de Ndrès tout en indiquant un endroit vers Landja-Mboko. Vu la distance, c’est des tracasseries. C’est pourquoi ma famille s’est organisée pour acheter une ferme au PK 22, au village Liton, afin d’inhumer notre proche décédé. Si chaque famille doit en faire autant, cela peut causer un problème de santé publique », regrette Éric, un père de famille.
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Si certaines familles peuvent acheter des fermes pour l’inhumation de leurs proches, d’autres ne sont pas en mesure de le faire. Certains Banguissois pointent du doigt la mairie de Bangui qui, selon eux, n’assume pas ses responsabilités.
L’absence de cimetière est un danger
« La mairie doit chercher un endroit approprié pour permettre aux gens d’enterrer leurs morts…C’est le gouvernement qui détient ce monopole. Il doit se concerter avec toutes les municipalités de Bangui afin de trouver un endroit et en faire un cimetière… Pour une grande ville comme Bangui, on ne peut pas inhumer les corps à côté des maisons. C’est un risque », dénoncent certains Banguissois.
Pour la mairie de Bangui, plusieurs raisons justifient ce manque d’espace pouvant servir de nécropole dans la ville de Bangui.
Incompréhension et résistance
« Il y a des sites de cimetière vers Bimbo, Bégoua et aussi au niveau de Landjia-Mboko mais, nous sommes confrontés à la résistance des occupants traditionnels. Quand les agents municipaux s’y rendent pour mettre en valeur ces cimetières, ces occupants traditionnels sortent des machettes et des fusils pour les menacer et les chasser », explique Ferdinand Songuéléma, chargé des affaires juridiques et des contentieux à la mairie de Bangui.
Les inhumations anarchiques, devenues presque légales à Bangui, représentent un réel danger pour la santé publique, selon les spécialistes de la santé.
Risque d’épidémie dans la communauté
« Quand la personne est inhumée, sa matière organique entre en dégradation. Cela constitue un réservoir pour les germes pathogènes qui parcourent la couche souterraine et atteignent la nappe d’eau qui circule dans le sous-sol. Les puits sont alors souillés et il peut y avoir par exemple, l’hépatite virale. Ces pratiques peuvent aussi entraîner l’épidémie dans la communauté », prévient Mardochée Mbassa, spécialiste en communication pour la santé.
Même si cette problématique reste une grande préoccupation pour le gouvernement et une inquiétude pour les Centrafricains, les morts continuent d’être inhumés dans des fermes familiales et dans des concessions privées.
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