Le procès de Jean-Pierre Bemba, ouvert le 22 novembre 2010, a repris ce mardi 23 août 2011 devant les juges de la Cour pénale internationale (CPI). Un 26ème témoin du Procureur doit être appelé à la barre. Le sénateur congolais et président du Mouvement pour la libération du Congo (MLC) est accusé de crimes contre l’humanité et crimes de guerre pour les meurtres, viols et pillages commis par ses soldats entre octobre 2002 et mars 2003 en Centrafrique.
Fin juillet, le sénateur congolais a été reconduit à la tête du MLC, qui l’a désigné comme candidat à la présidentielle du 28 novembre prochain en République démocratique du Congo (RDC). Dans un courrier lu au cours du congrès du parti, Jean-Pierre Bemba écrivait être « résolument rivé sur l’échéance de 2011. Je m’y suis préparé chaque jour ». Il précisait « ne pas craindre la justice des hommes, seule la justice de Dieu m’importe ».
Selon les prévisions du greffe, le procès devrait prendre fin en décembre 2012. Interrogé sur la possibilité, pour Jean-Pierre Bemba, d’exécuter son mandat s’il devait être élu, l’un de ses avocats, Aimé Kilolo, rappelle « le cas des Kényans [inculpés par la CPI]». « Certains parmi eux sont ministres et les poursuites engagées par la Cour ne les empêchent pas d’exercer leurs activités politiques ». Les six suspects kényans, dont le procès n’a pas commencé, ne sont pas détenus dans la prison de la CPI, mais comparaissent librement devant la Cour. Selon l’avocat, si Bemba est élu,« des aménagements pourraient être trouvés. C’est une Cour internationale, qui peut siéger n’importe où dans le monde ».
L’Agence Hirondelle qui suit le procès de Jean-Pierre Bemba à la Haye, explique que l’inculpation de ce dernier a privé la RDC d’une opposition forte au président Joseph Kabila, favori de ce scrutin à un tour. Interrogé par téléphone, Georges Kapiamba, président de l’Association africaine de défense des droits de l’homme (ASADHO), estime, pour sa part, que la candidature du sénateur congolais « est un mauvais calcul. C’est une façon de prendre le parti en otage ».
Certains journaux congolais estiment que la candidature de Jean-Pierre Bemba serait un moyen de monnayer son soutien aux autres candidats. Dans sa cellule de la prison de Scheveningen, où l’accusé reçoit de nombreux visiteurs, il a pu rencontrer, début août, au moins trois autres candidats de l’opposition, Etienne Tshisekedi, Vital Kamerhe et Léon Kengo wa Dondo.
Selon une source proche du dossier, la défense a, une nouvelle fois demandé, fin juin, la mise en libération de Jean-Pierre Bemba. L’accusé aurait demandé à la Cour l’autorisation de se rendre à Kinshasa « par ses propres moyens, à bord de son avion, et accompagné de gardes », indique cette même source. Vendredi 19 août, la chambre d’appel rendait une décision, à huis clos, sur cette question. Interrogé à la sortie de l’audience, maître Aimé Kilolo n’a pas souhaité confirmer, mais a simplement expliqué que « des initiatives, qui tournent autour des droits qui lui sont reconnus par le Pacte international des droits civils et politiques, sont en cours ».
L’Agence Hirondelle rappelle que des prisonniers de la CPI ont déjà eu à conduire une campagne électorale depuis leur cellule de La Haye. Les détenus serbes jugés par le Tribunal pour l’ex-Yougoslavie, Slobodan Milosevic et Vojislav Seselj ont, en leur temps, fait acte de candidature.
Jean-Pierre Bemba est détenu dans la prison de Scheveningen depuis le 3 juillet 2008. Candidat malheureux à la présidentielle de 2006 au Congo, il s’était exilé en Europe et avait été arrêté dans sa résidence, située dans une banlieue de Bruxelles, en Belgique, le 24 mai 2008.