Delphine, la trentaine, mère d’une famille nombreuse, a ouvert ce dimanche 16 octobre 2011, le journal de Radio Ndeke Luka par ce témoignage poignant : « Je n’en peux plus ! Je suis vraiment dépassée. C’est depuis plus de trois ans déjà que dans ma famille nous n’avons qu’un seul repas par jour. Je vous fais un calcul simple. Mon mari me donne 2000 Francs CFA (environ 3 euros) par jour pour le repas. Pour préparer par exemple de la viande de bœuf, je peux acheter un kilogramme à 1000 FCFA (environ 1,3 euros), du coup je n’ai plus rien pour acheter les autres condiments, sachant qu’il me faut tout acheter, parce qu’il n’y a pas de réserve à la maison ».
En cette journée mondiale de l’alimentation, cette situation décrite par Delphine est sans doute partagée par la grande majorité des ménages à Bangui, comme dans les provinces. Le plus souvent, la règle des 3 repas quotidiens n’est plus qu’un lointain souvenir.
Pire encore, même le seul repas quotidien pris se trouve « dévalué ». Delphine explique encore : « Le plus souvent, je suis obligée de préparer très souvent le gnetum (NDLR : aliment à base de feuilles bon marché). Ainsi, je ne peux plus préparer le repas le matin. On mange seulement et désormais à midi. Les enfants sont obligés de grignoter des petites choses comme de l’arachide, de maïs et si c’est la saison des mangues, je suis sauvée ! Tout le monde est tenu d’être à la maison le soir à l’heure du repas. Souvent, il y a des problèmes avec les garçons. Ils sont régulièrement absents et donc on mange sans eux. A leur retour, ils s’en prennent à moi ! »
On écoutant Delphine, on se rend compte à quel compte la crise, l’inflation, la pauvreté, frappent de plein fouet les ménages. Le panier de la ménagère est malmené. A-t-il encore seulement un fond ?
Le thème de cette journée mondiale de l’alimentation entend bien pourtant combattre ces situations : « prix des denrées alimentaires, de la crise à la stabilité». Les gouvernants et institutions qui l’ont retenu, ont donc conscience que la fluctuation des prix, en particulier à la hausse, fait peser une grave menace sur la sécurité alimentaire dans les pays pauvres dont la République Centrafricaine.
Pour marquer la journée, ces mêmes autorités se sont donné rendez-vous dans le village de Bogoura, sur la route de Boali (Ouest de Bangui). La population du village et ceux des villages environnants viendront écouter les discours. Puis, ils repartiront le ventre aussi vide.
La journée mondiale de l’Alimentation est une occasion pour la population mondiale qui atteindra bientôt les 7 milliards d’individus d’envisager sérieusement les causes de la fluctuation des prix de ces denrées et trouver des solutions pour réduire ses effets sur les membres les plus faibles de la société.
D’après les économistes, cette instabilité des prix des denrées alimentaires n’est pas près de s’arrêter. Les personnes vivantes avec moins d’un dollar et demi par jour peuvent être contraintes de sauter un ou deux repas quand ces prix augmentent.
La Banque Mondiale a affirmé que ce phénomène a jeté près de 70 millions de personnes dans une extrême pauvreté. La hausse des prix des denrées alimentaires porte un grave préjudice à ces personnes. Elle en fait, à l’image de Delphine, « des chercher-à-manger ».
Si rien n’est fait dans l’urgence, elles vont bientôt se transformer en « meurt-de faim »