Bangui, la capitale centrafricaine et plusieurs autres villes du pays font face au menace d’inondations. Plusieurs sinistrés ont déjà quitté leurs habitations.
A Bangui, face à l’élévation du niveau des rivières Oubangui et Mpoko, les riverains, en particulier ceux situés dans le sud, manifestent de vives inquiétudes quant à leur sort. Les résidents dont les habitations sont inondées se sont réfugiés sur le site du Port pétrolier, où ils endurent des conditions de vie précaires. Ce site a été aménagé de manière temporaire par les autorités centrafricaines.
Dès le début de ces inondations, la tente qui avait servi d’abri aux victimes de l’année précédente est presque entièrement occupée. De nombreuses victimes, majoritairement des femmes et des enfants, y installent des nattes et passent la nuit sous ce hangar. L’espace restant ne peut accueillir un nombre conséquent de personnes. Laurentine, mère de famille, exprime déjà son inquiétude face à cette promiscuité.
« Quand tout le monde va arriver sous ce hangar, il n’y aura plus de place. Parfois, tu es obligé de sauter sur ton voisin pour sortir. Nous voulons que ce hangar soit agrandi pour que ceux qui seront touchés par les inondations puissent trouver un endroit où se poser, car cela provoque souvent des disputes entre nous », se désole-t-elle.
Honorine et son bébé de 7 mois se trouvent ici à cause des inondations comme à l’an dernier. Elle redoute une nouvelle catastrophe.
« C’est ma deuxième année consécutive au camp des déplacés, et la situation reste difficile. L’année dernière, je n’avais pas de place et j’ai été contraint de dormir dehors, exposé aux intempéries. J’espère que cette fois, des solutions seront trouvées pour accueillir tous ceux qui ont besoin d’aide », souhaite cette dernière.
Pierre, âgé d’une soixantaine d’années, a été désigné délégué par ses pairs pour gérer les mésententes et orienter la répartition des éventuelles aides. Cependant, il déplore les mauvaises conditions de vie auxquelles ils sont confrontés. Son rôle est crucial, mais il sait que sans amélioration des conditions, leur situation ne pourra pas s’améliorer durablement.
« En tant que délégué, je m’efforce de gérer les conflits et de répartir les aides, mais je ne peux ignorer les conditions de vie déplorables que nous subissons. Sans un changement significatif, nos efforts resteront vains », plaide-t-il.
En attendant une meilleure prise en charge, le gouvernement a décidé de délocaliser les victimes d’inondations des quartiers sud de Bangui vers Samba, village située à 17 km au sud-ouest de Bangui sur la route de Mbaïki. Selon la ministre des Actions humanitaires, Lina Josiane Bemakassoui, des logements seront construits pour chaque ménage afin de leur fournir un abri sûr.
-Lire aussi : Inondations : Bozoum dans le nord de Centrafrique coupé en deux, plus de 150 maisons écroulées
L’habitat et l’agriculture durement impactés à Bozoum
Depuis samedi 28 septembre, après de fortes pluies, la ville de Bozoum dans le nord est coupée en deux, conséquence du débordement de la rivière Koyalé qui a immergé le pont qui relie les deux parties de la ville. Selon les premiers bilans de la Croix-Rouge locale, plus de 200 maisons se sont écroulées et plusieurs centaines d’autres trainent encore dans les eaux. La Croix-Rouge dénombre en outre plus de 1500 sinistrés.
En plus de ces dégâts matériels, les récentes intempéries ont inondé environ 100 hectares de culture de riz dans les villages de Boro, Gorom et Han, près de Bozoum. Si aucune mesure n’est prise, l’économie rurale risque d’en subir de lourdes conséquences. La coopérative rizicole de la région lance un appel au secours pour sauver cet investissement crucial pour la communauté.
Sur les différents sites de production de riz dans les villages de Boro, Gorom et Han, les riziculteurs sont en larmes. Ils craignent de perdre 96 hectares, représentant un rendement de 130 tonnes, à cause de cette inondation. La perte aurait des répercussions désastreuses sur leur subsistance et l’économie locale.
« Nous sommes 139 riziculteurs confrontés à d’importantes pertes dans nos récoltes. Nous appelons le gouvernement et ses partenaires à nous apporter leur soutien pour préserver ce qu’il nous reste. Les pertes sont vraiment considérables », a alerté Zakarie Bendouma, président de la coopérative rizicole de Boro.
La culture du riz représente une source de revenus essentielle pour les agriculteurs durant les foires agricoles. Malheureusement, Saturnin Bélaguina, producteur de riz, se retrouve avec un investissement réduit à néant à cause de cette catastrophe naturelle.
« En tant que père de famille, je suis dévasté. L’année dernière, j’ai pu vendre mon riz à une ONG pour 2 500 000 frs CFA, mais aujourd’hui, avec cette catastrophe, tout cela semble perdu. Je crains pour l’avenir de ma famille », telle est son inquiétude.
Une menace pour les agriculteurs
Les cadres de l’Agence centrafricaine de développement agricole (ACDA) s’inquiètent des effets des inondations sur la production annuelle de la région. Ils soulignent les risques pour les agriculteurs et l’impact sur leurs moyens de subsistance.
« Les inondations menacent non seulement nos récoltes, mais aussi les moyens de subsistance de nos agriculteurs. Il est crucial d’agir rapidement pour évaluer les dommages et apporter l’aide nécessaire », a fait savoir Faustin Ndoupendji, conseiller technique de l’ACDA à Bozoum.
Les prévisions météorologiques annoncent de fortes pluies en cette fin de saison des pluies. Cette situation menace non seulement les récoltes, mais aussi les autres cultures qui sont essentielles pour les revenus des habitants.
Plusieurs autres villes centrafricaines sont menacées par les inondations. Plusieurs localités de la Vakaga dans le nord-est, Mbomou dans le sud, Ouham et Ouham-Fafa dans le nord commencent à subir les impacts de ces inondations. Beaucoup s’inquiètent de revivre le drame de 2019.
-Lire aussi : Bozoum : les inondations bloquent la principale voie de ravitaillement