Le restaurant M, situé au Centre-ville en face de l’Alliance française de Bangui a fermé ses portes mardi 25 mars. Une fausse alerte à la bombe a très vite conduit à cette prise de décision. Mylène Limbiot, propriétaire de ce restaurant raconte l’histoire à la cellule StopATènè de Radio Ndeke Luka.
Qu’est-ce qui est arrivé au restaurant M ?
« Mardi 18 mars, dans l’après-midi, des militaires de la Minusca [mission des Nations Unies en Centrafrique] sont arrivés devant mon restaurant. Ils indiquent avoir reçu une alerte à la bombe dans mon établissement. Une alerte d’une source anonyme. Anonyme jusque-là. Selon eux, l’alerte coïncidait avec l’arrivée d’une autorité qui devait venir dîner le lendemain dans mon restaurant. Et ils sont donc venus vérifier. Ils sont alors repartis pour revenir le lendemain, une quinzaine de porteurs de tenue de la Minusca et de la gendarmerie nationale. Ils ont fouillé mes réserves, ma cuisine, mes toilettes ainsi que le bar. Ils n’ont rien trouvé de suspect. Aujourd’hui, je viens vers vous pour dénoncer cet acte parce que cela m’a causé trop de préjudice. »
Comment cela a impacté votre restaurant ?
« Cela a eu une très grosse répercussion sur mon établissement. Depuis ce jour, tous les dîners prévus et programmés au restaurant M sont annulés. On a dit à tout le monde de ne pas venir chez moi à cause de cette alerte à la bombe. Une chose que j’ai trouvée très malsaine et très triste. »
Qu’est-ce que vous réclamez après ce que vous qualifiez de préjudice ?
« La justice ! Tout est parti, selon mon constat, d’un débat à la télévision centrafricaine la semaine dernière, où le service d’hygiène de Bangui a affirmé que l’hygiène n’est pas prise en compte dans nos activités restauratrices.
Par la suite, il y a eu cette soudaine histoire de bombe dans mon restaurant. Mais demain, qu’en sera-t-il ? Sûrement une autre histoire dans le but de nuire définitivement à mes affaires. Par ailleurs, toutes les organisations internationales interdisent depuis ce jour à leurs personnels de venir chez moi. Une chose que je ne comprends pas. »
Est-ce que les forces de la Minusca avaient avec elles un document autorisant l’inspection de votre restaurant ?
« Aucun ! Ni un document ni un mandat de perquisition n’a été présenté. Ils (les agents tunisiens de la Minusca) ont dit qu’on n’avait pas à faire de bruit et que je n’aurais pas de répercussions. Mais aujourd’hui, j’en subis les conséquences. Cet incident m’a beaucoup impactée. Car j’ai non seulement perdu en popularité, mais j’ai aussi vu ma réputation être salie et souillée. »
Cet incident vous a coûté combien en termes de finances ?
« Je ne regrette rien de ce que j’ai perdu financièrement. Je m’inquiète beaucoup plus pour mon moral, ma réputation et ma confiance envers mes clients. Même si ma santé s’est un peu dégradée suite à cet acte. Je souffre d’un cancer du sein. »
Vous en voulez à la Minusca aujourd’hui ?
« Je demande simplement à la Minusca d’être dorénavant discrète et méthodique dans ses manœuvres concernant l’inspection ou la perquisition d’un endroit. Qu’elle se renseigne davantage sur les informations et les sources d’alerte et qu’elle se munisse d’un mandat de perquisition avant de fouiller un service. Après tout, je suis seule maintenant face aux taxes et impôts que je dois payer. Cependant, cette affaire, comme je le vois, est un signe annonciateur de perte de ma clientèle ainsi que de la chute de mon entreprise. »
StopATènè, la cellule numérique de Radio Ndeke Luka qui lutte contre la désinformation, les rumeurs et les messages de haine.