Les professionnels des médias ont organisé ce mercredi, une marche pacifique de la Place des Nations jusqu’au siège de la Mission multidimensionnelle intégrée de stabilisation des Nations unies en Centrafrique (Minusca). Ils ont désapprouvé et dénoncé, par cette marche pacifique, les tueries de deux de leurs confrères. La journée a été sans presse pour protester contre les décès de Désiré Sayénga, rédacteur au quotidien ‘‘Le Démocrate’’ et de René Padou, un des promoteurs de Radio ESCA (Eternel sauve le cœur de l’Afrique) et superviseur de Radio Opération Jéricho.
« Jusque-là, on nous menace verbalement, on nous arrête, on nous emprisonne. C’est grave. Même sous Bokassa le dictateur, on n’a pas tué un journaliste. C’est bizarre que pendant la transition, on tue deux journalistes dans la même soirée comme si on cible les journalistes », a relevé le président de l’Union des journalistes Centrafricains (UJCA), Maka Gbossokotto.
Le directeur de publication du journal ‘‘Le Confident’’, Mathrin Momet, a mis en exergue le mutisme total des dirigeants centrafricains et de la société civile au sujet de la mort des deux journalistes. Il exige du gouvernement l’assurance de la protection de la population.
« Récemment, deux de nos confrères ont été tués, il n’y a pas eu de réactions de la part des dirigeants et de la société. Nous intervenons pour dire que trop c’est trop. Il faut que le gouvernement et la communauté internationale prennent leurs responsabilités pour assurer la sécurité de tous les citoyens », a déclaré à RNL M Momet.
A la Minusca, un mémorandum a été remis au Représentant spécial du secrétaire général des Nations unies en Centrafrique, Lawrence Wohlers, par une délégation de journalistes conduite par le président de l’UJCA. Lawrence Wohlers a d’abord compati avec les professionnels des médias avant d’opter pour leur protection, a rapporté Sylvie Panika, Directrice de Réadio Ndeke Luka et l’un des membres de la délégation. « La première décision qu’il va prendre, c’est de demander au niveau de ses services de mettre à la disposition de la presse, une équipe qui va travailler avec elle sur la sécurité des journalistes. Il a demandé à avoir un état des lieux des menaces à l’encontre des journalistes ».
Les professionnels de la presse ont indiqué que les résolutions 2121 et 2127 du conseil de sécurité des Nations Unies exigent des forces internationales, déployées en Centrafrique, la stricte application du chapitre 7 qui les autorisent à faire usage de la force pour désarmer les éléments des forces nuisibles à la paix et au développement de la paix en République Centrafricaine.
Les journalistes ne comprennent pas que la sécurité des personnes et des biens ne soient pas assurées par les autorités de la transition et la communauté internationale. « Les Forces armées centrafricaines (FACA) ne sont pas réhabilitées, alors qu’elles maîtrisent le terrain et sont motivées pour le retour de la paix en Centrafrique », a indiqué Maka Gbossokotto.
Car comment comprendre qu’au Mali, la communauté internationale ait restructuré, formé et appuyé l’armée qui n’était plus que l’ombre d’elle-même, et refuse de faire la même chose en Centrafrique.
Selon M Gbossokotto, « Voudrait-on attendre 20 ans plus tard pour venir faire le mea culpa, comme au Rwanda, après ce qui se passe en Centrafrique, alors qu’il est encore temps d’agir pour sauver la RCA ? ».
Pour rappel, les deux cas de tueries sont intervenus le 30 avril dernier. Le premier a été celui de Désiré Sayénga, rédacteur au quotidien ‘‘Le Démocrate’’. Il a été agressé par des individus à Fatima dans le 6e arrondissement de Bangui. Les bourreaux l’ont roué de coups, poignardé, avant de lui tirer une balle dans la poitrine, l’abandonnant baignant dans son sang. Désiré Sayénga va succomber le 1er mai à l’hôpital communautaire.
Dans la même soirée du 30 avril, René Padou, un des promoteurs de Radio ESCA (Eternel sauve le cœur de l’Afrique) et superviseur de Radio Opération Jéricho, a été agressé à son domicile au quartier Sarah dans le 3e arrondissement. Selon les informations, une grenade a été balancée dans sa concession. Admis à l’hôpital communautaire, il décède le 5 mai 2014.