Un calme précaire règne en ce moment à Bangui au quatrième jour d’une violente manifestation qui paralyse la Capitale centrafricaine. Dans un discours radiodiffusé le 28 septembre 2015, le Chef d’État de la transition, Catherine Samba-Panza a appelé les centrafricains à la retenue et au patriotisme.
» J’appelle tous les protagonistes de cette énième nouvelle crise de tous les bords à la retenue et au respect des engagements pris devant l’opinion nationale et internationale lors du forum national de Bangui afin d’accorder la primauté au dialogue et à la réconciliation « , a déclaré Catherine Samba-Panza. » J’en appelle au patriotisme des forces vives de la nation de s’impliquer sincèrement dans la recherche de la paix et au maintien de la cohésion inter-communautaire en évitant à tout prix de jeter l’huile sur le feu « , a-t-elle ajouté avant de réitérer sa » ferme volonté de conduire le pays vers des élections apaisées, démocratiques et incontestables en vue du retour à l’ordre constitutionnel « .
L’ONU et la CEEAC s’en mêlent
Dans une déclaration sur la République centrafricaine et attribuée au porte-parole du Secrétaire général de l’ONU, l’organisation » déplore l’éruption soudaine de violence en République centrafricaine et la perte tragique de vie de plus de 30 personnes ainsi que les plus de 100 blessés ». Tout en condamnant tous les actes de violence, le porte-parole du Secrétaire général de l’ONU » appelle à un arrêt immédiat de la violence inacceptable et des attaques de représailles. Il exhorte les Autorités de transition de la République centrafricaine à faire tout ce qui est dans leur pouvoir pour prévenir de nouvelles violences ».
De son côté, la présidence de la Communauté Économique des États de l’Afrique Centrale (CEEAC) invite les parties prenantes au processus de sortie de crise en RCA « au calme et à plus de retenue, et à privilégier le dialogue et la concertation pour sauvegarder les acquis obtenus jusqu’ici dans le retour à la paix et la stabilité, grâce aux sacrifices et efforts de la Communauté internationale, et des acteurs nationaux ».
Maintenir la pression
Alors que plus de 500 détenus ont réussi à s’évader de la prison centrale de Ngaragba ce 28 septembre 2015, la société civile maintient son appel à la désobéissance civile. Gervais Lakosso, son Coordonnateur explique que » le mouvement « Le temps de Béafrika » est un mouvement pacifiste et citoyen qui n’a aucun lien avec la marche qui a eu lieu avec la tentative de déstabilisation des institutions de la République ». Il précise par ailleurs que les revendications de la société civile restent fondamentalement » le redéploiement des FACA et la stricte application du mandat de l’ONU « . Toutefois, renchérit Gervais Lakosso, » le rassemblement citoyen qui devrait avoir lieu ce mercredi 30 septembre 2015 est maintenu ». A cet effet, les habitants de Bangui sont invités à se rassembler à la place des Martyrs afin de revendiquer leurs droits à la sécurité et ce, « sans armes à feu ni armes blanches, sans sacs à mains et sans sacs au dos ».
Cet appel à la désobéissance civile lancé par le groupe de la société civile est soutenu par le Collectif des Jeunes Leaders Centrafricains (COJELCA). Bienvenu Paradis Gbadora, Coordonnateur dudit mouvement demande à la jeunesse et au peuple centrafricain » sans esprit de manœuvre, de considération ethnique et autres méfaits de maintenir pacifiquement la pression de la rue sans bavures en évitant de tirer sur les forces étrangères, de s’adonner aux braquages, aux pillages et à la destruction des biens publics et privés ».
Le Conseil National de la Jeunesse Centrafricaine (CNJCA) met en garde pour sa part le gouvernement centrafricain et la communauté internationale en leur exigeant de s’assumer en traquant sous 72 heures les auteurs des derniers crimes intervenus dans le pays. « Nous demandons au gouvernement et à la communauté internationale de prendre leurs responsabilités et de traquer dans un délai de trois jours tous ceux qui ont massacré les paisibles populations centrafricaines », a déclaré Jean Félix Riva, président du CNJCA.
» Si le gouvernement et la communauté internationale refusent de prendre leurs responsabilités, les forces armées centrafricaines doivent s’assumer et la population va les soutenir « , martèle le président du CNJCA qui affirme par ailleurs que » nous n’avions plus confiance en personne car personne n’est aujourd’hui capable de défendre les populations centrafricaines « .
Dans un communiqué rendu public ce 29 septembre 2015 par le Directeur général de la police centrafricaine, il est demandé aux officiers généraux, les officiers supérieurs, officiers et hommes de rang de la police centrafricaine présents à Bangui de se faire enregistrer.
Quartier consigné
» Le Gouvernement demande à tous les policiers, gendarmes et militaires qui n’ont pas encore rejoint leurs casernes respectives, de le faire sans délai, le quartier étant consigné jusqu’à nouvel ordre. Tous ceux qui prendront le risque de rester dans le camp des ennemis de la paix, seront considérés comme déserteurs avec toutes les conséquences de droit » peut-on lire dans une déclaration publiée le 28 septembre par Dominique Saïd Paguindji, ministre de la sécurité publique et porte parole du gouvernement centrafricain.
» Tous les officiers de l’armée et les gens qui sont derrière ce coup de force sont bien identifiés et suivis. Le moment venu, le Gouvernement prendra ses responsabilités car toutes ces agitations sont contraires aux engagements pris publiquement lors du Forum de Bangui, à savoir que les FACA sont et resteront apolitiques et souveraines » , souligne le communiqué gouvernemental.
» Toutes les dispositions sont prises pour garantir la libre circulation et la sécurité des populations par le déploiement des patrouilles dans la ville, la levée des barricades sur certaines artères de la ville de Bangui, l’ouverture de quatre stations services Total et Tradex à Pétévo, Bamag et marché Central et Oubangui, et l’ouverture d’un numéro vert à partir duquel toutes les personnes en besoin de protection peuvent joindre les forces de sécurité intérieure », conclut le communiqué signé par Dominique Saïd Paguindji.
Selon un bilan encore provisoire, les violences qui paralysent la Capitale centrafricaine depuis quatre jours ont déjà fait plus de 40 de morts, une centaine de blessés et plusieurs maisons incendiées.