Placé en détention préventive à la CPI le 17 novembre 2018, à la suite de son arrestation le 29 octobre de la même année en marge d’un incident survenu à l’Assemblée nationale centrafricaine, l’ancien chef de la milice anti-balaka, Alfred Yekatom Rombhot attend d’être fixé sur la date du début de son procès. Alors que les charges de crime de guerre et crime contre l’humanité qui pèsent sur lui, ont été partiellement confirmées par la CPI en décembre 2019, le bureau du procureur a formulé le 14 mai 2020 une demande de nouvelles charges. Demande rejetée par les juges.
L’affaire Yekatom Rombhot promet d’être longue devant la Cour Pénale Internationale (CPI). Alors qu’une demande de sa mise en liberté provisoire formulée par sa défense n’a pas encore eu gain de cause, le bureau du procureur est revenu à la charge. Le 14 mai 2020, l’accusation a formulé une demande à la Chambre préliminaire II d’ajouter de nouvelles charges contre M. Yekatom Rombhot. Il s’agit des accusations de viols et d’esclavage sexuel, des crimes qui auraient été commis par les éléments de cet ancien militaire centrafricain, devenu chef de milice entre 2013 et 2014.
Deux semaines après l’avoir reçue, la cour a rejeté le 1er juin 2020 ces nouvelles charges, estimant que les arguments avancés par le bureau du procureur n’étaient pas convainquant.
« Le procureur avait expliqué les raisons pour lesquelles sa demande avait été déposée à ce stade tardif de la procédure et la chambre a jugé qu’elle n’était pas convaincue par les raisons évoquées par le procureur » a expliqué Me Mylène Dimitri, conseil principal de Alfred Yekatom Rombot.
« Parmi la série de raisons évoquées par la chambre, elle a notamment mentionné qu’elle voulait éviter que le procès prenne une forme indéfinie, pour faire en sorte que le procès soit bien limité par les charges qui avait d’ores et déjà été confirmées par la chambre de première instance. Ceci, pour éviter que les charges soient constamment amendées après presque 19 mois de détention préventive et en pleine préparation au procès par la défense » a jouté Me Mylène Dimitri.
Un satisfecit pour la défense qui en profite pour exhorter la CPI à toujours jouer son rôle de « gardienne protectrice des droits fondamentaux de l’accusé ».
« C’est important de préserver les droits fondamentaux de M. Yékatom, parce que nous avons commencé à enquêter, il est en détention préventive et la défense ne peut pas constamment changer la direction de ces enquêtes, parce que cinq ans plus tard, le procureur décide d’ajouter certaines charges qu’il avait omises d’ajouter, » a martelé le conseil principal de la défense.
La démarche du Procureur est-elle légale?
L’article 61 du statut de Rome, régissant le fonctionnement de la Cour pénale internationale, en son alinéa 9 stipule:
« Après confirmation des charges et avant que le procès ne commence, le Procureur peut modifier les charges avec l’autorisation de la Chambre préliminaire et après que l’accusé en a été avisé. Si le Procureur entend ajouter des charges supplémentaires ou substituer aux charges des charges plus graves, une audience doit se tenir conformément au présent article pour confirmer les charges nouvelles. Après l’ouverture du procès, le Procureur peut retirer les charges avec l’autorisation de première instance ».
Cependant, l’alinéa 8 précise : « Lorsque la Chambre préliminaire ne confirme pas une charge, il n’est pas interdit au Procureur de demander ultérieurement la confirmation de cette charge s’il étaye sa demande d’éléments de preuve supplémentaires ». Reste donc à savoir si le bureau du Procureur reviendra à la charge avec de nouvelles preuves pour étayer sa demande rejetée.
Alfred Yekatom Rombhot, ancien chef de la milice anti-balaka et député de Mbaïki 2 a été arrêté le 29 octobre 2018 en marge d’un incident survenu dans l’hémicycle de l’Assemblée Nationale, lors du vote du nouveau Président du parlement. Il a été remis à la Cour Pénale Internationale le 17 novembre 2018 sur demande de la cour qui l’accuse d’avoir commis des crimes de guerre et des crimes contre l’humanité en 2013 et 2014 en République Centrafricaine. Le 11 décembre 2019, la CPI a confirmé partiellement les charges contre Alfred Yekatom Rombhot. Elle a donc renvoyé le dossier en procès. Cependant, la date du procès n’est toujours pas encore connue.