- Bangui est la première ville la plus chère pour les expatriés en Afrique, rapporte le cabinet américain Mercer dans son classement 2022 sur le coût de la vie. Sur le plan mondial, la capitale centrafricaine occupe la 23eplace sur un échantillon de 209 villes classées.
- Selon l’Institut centrafricain des études économiques et sociales (ICASEES), ces données sont relatives et nécessitent une mise à jour de l’Indice national à la consommation (IPC) pour des fonctionnaires expatriés.
- Au vu des éléments apportés par l’ICASEES, nous pouvons conclure que la déclaration selon laquelle « Bangui est la ville la plus chère d’Afrique pour les expatriés » est relative.
Publié en juillet 2022, le rapport du Cabinet Mercer a été réalisé en mars dernier dans le but d’« aider les entreprises multinationales et les gouvernements du monde entier à déterminer des stratégies de rémunération pour leurs employés expatriés ».
D’après ce rapport, le classement s’aligne sur des critères spécifiques entre autres, le coût du logement, du transport, de l’alimentation, de l’habillement, des articles ménagers et le divertissement dans les villes étudiées. La République centrafricaine est classée 1ère ville africaine la plus chère et 23eme sur le plan mondial pour les internationaux. Ce positionnement se justifie par la forte dépendance du pays à l’importation.
Captures d’écran du site Mercer
Pour vérifier cette affirmation, la cellule #StopAtènè s’est rapprochée de l’Institut centrafricain des études économiques et sociales (ICASEES). Selon cet institut, ces données sont relatives comparativement à d’autres villes du continent et ne concernent que les fonctionnaires internationaux vivant à Bangui.
Pour Parfait Nalibert, chef de services des statistiques des prix, quatre points importants sont à retenir sur la cherté de la ville de Bangui. Il s’agit de :
- Le logement
Un fonctionnaire expatrié peut payer son logement jusqu’à 3.000.000 de FCFA par mois. Cette situation est alarmante puisque les bases ne sont fixées que par le bailleur, car aucune grille n’existe en République centrafricaine dans ce sens. En plus, pour des raisons sécuritaires, ils préfèrent des logements classés dans la « zone verte » (jugée stable sur le plan sécuritaire). « Un expatrié ne choisira pas d’habiter dans les zones limitatives comme PK12 », explique Parfait Nalibert.
« Ce qu’il faut savoir, c’est que le Gouvernement n’a pas encore fixé les prix planchers et les prix plafonds des loyers. C’est à la tête du client que les prix se discutent. En réalité, les propriétaires des immeubles et villas dont les prix des loyers sont chers sont, pour la plupart, des ressortissants non centrafricains », justifie Blaise Bienvenu Ali Katalikora, directeur général de l’ICASEES.
- Le transport
Avec la crise du carburant, un expatrié peut dépenser jusqu’à 1500 FCFA par litre de carburant alors que le prix officiel à la pompe est de 855 FCFA. Cette situation est plus dérangeante pour certains qui choisissent de laisser leur moyen de locomotion de service et d’utiliser le transport en commun dont les frais varient en fonction des distances.
- Alimentation
La plupart des expatriés qui travaillent en Centrafrique ne fréquentent que les supermarchés pour se ravitailler en produits de première nécessité. Un produit laitier coûte environ 3 euros dans un supermarché, ce qui équivaut à presque 2000 FCFA. Les expatriés se procurent plus généralement des produits fruitiers et les légumes dans ces grands centres commerciaux où une botte de légumes se vend à 500 FCFA alors que la même quantité est vendue à 100 F voire 50 FCFA aux marchés Gobongo, Combattant ou Pongoulou situés dans les quartiers dits moins développés.
- Les restaurants
Contrairement à un Centrafricain, un expatrié ne fréquente que les restaurants huppés de la capitale. Un plat dans ces endroits coûte en moyenne 5000 FCFA pour une personne alors que dans certains endroits de la ville, il coûterait trois fois moins.
Une déclaration jugée relative par l’ICASEES
Dans un argumentaire développé sur sa page Facebook le 09 juillet 2022, le directeur général de l’ICASEES, Blaise Bienvenu Ali Katalikora, a démontré que l’affirmation selon laquelle « Bangui est la ville africaine la plus chère pour les fonctionnaires expatriés » est relative.
Captures d’écran Facebook de Blaise Bienvenu Ali Katalikora
Pour en savoir davantage, la cellule #StopATènè a eu un échange téléphonique avec Blaise Bienvenu Ali Katalikora. Ce dernier affirme : « Je ne suis pas sûr qu’en dehors de l’ICASEES, ces Cabinets internationaux aient collecté et calculé l’Indice des prix à la consommation (IPC) des expatriés. L’ICASEES ne calcule plus ce type d’indices faute de moyens et se contente de l’IPC des ménages centrafricains ».
En conclusion, les données présentées par le Cabinet Mercer ne sont pas fausses mais ne prennent pas en compte l’Indice national à la consommation des ménages centrafricains. Donc, la déclaration selon laquelle « Bangui est la ville d’Afrique la plus chère pour les fonctionnaires expatriés » est relative.
#StopATènè, l’équipe qui lutte contre la désinformation et les discours de haine en Centrafrique.
Sources:
- Site web du Cabinet Mercer (https://www.mercer.com/our-thinking/career/cost-of-living.html?utm_source=mercerweb&utm_medium=banner#city-ranking)
- Parfait Nalibert, chef de services des statistiques des prix à l’ICASEES
- Blaise Bienvenu Ali Katalikora, Directeur général de l’ICASEES