Devant l’éloignement ou l’absence de l’appareil judiciaire, certains habitants de la région de Paoua, chef-lieu de Lim-Pendé (nord), rendent eux-mêmes justice. Deux chefs de villages, accusés de pratiques de sorcellerie et de charlatanisme ont été lynchés par une foule en colère.
Le drame a eu lieu il y a un mois. L’information était restée en coulisse jusqu’à sa révélation cette semaine par Romain Lamia Penedji, député de Paoua 3. Selon lui, les deux personnes exécutées par cette foule en colère sont les chefs des villages Mbelessé et Garawila, à plus d’une soixantaine de kilomètres de Paoua-centre. Ils ont été déportés dans la commune de Malé avant d’être exécutés.
« Les deux chefs de village étaient accusés de charlatanisme. Et lorsqu’ils ont affirmé avoir tué 35 personnes, les parents des victimes se sont levés pour appeler à leur mise à mort. C’est ainsi qu’ils ont été abattus. Mais la justice populaire est prohibée par la loi. Lorsqu’il y a un problème, il faut saisir le procureur qui se trouve à Paoua », a déploré Romain Lamia Penedji, député de Paoua 3.
A en croire l’élu de la Nation, les unités de police judicaire, contactées d’urgence depuis Paoua, n’ont pas été dépêchées à temps faute de moyen de déplacement adéquat. Ce qui, selon lui, a favorisé l’accomplissement du drame, avec de rites plus lents. Donnant plus d’explications, Romain Lamia Penedji raconte que les victimes ont été contraintes par leurs bourreaux, de creuser elles-mêmes leurs tombes. La foule leur a ensuite remis de machettes et ils se sont entrecoupés avant d’être achevés.
-Lire aussi : Centrafrique : des leaders communautaires de Bangui et ses environs impliqués dans la lutte contre la justice populaire
Jusqu’au moment où nous publions cette information, aucun suspect n’a été arrêté par la justice. Face à cette situation qui dépasse l’entendement, l’élu de la Nation appelle le gouvernement à l’aide.
L’absence de l’Etat pointée du doigt
« Je demande au gouvernement de déployer les forces de défense et de sécurité ainsi que les forces de sécurité intérieure dans la zone afin de faire face à cette situation. Puisqu’en l’absence de l’autorité de l’Etat, les populations ne pourront que s’adonner à ces genres de pratique », a imploré Romain Lamia Penedji.
Dans les zones périphériques de Paoua, la libre circulation des biens et des personnes reste un défi. Même si le processus de désarmement pilote a été organisé en 2018 dans la ville, rien ne prouve que les hommes armés s’inscrivent dans la logique de la paix.
-A écouter : Mag-justice : que dit la loi concernant la justice populaire ?