La Cour pénale spéciale (CPS) a annoncé lundi dans un communiqué, avoir exécuté en fin août, les mesures de réparation prononcées le 23 octobre 2023 par la chambre d’appel dans l’affaire dite de Paoua. Une quarantaine d’ayants-droits et victimes du massacre de Koundjili et Lemouna dans la commune de Paoua en mai 2019, ont donc reçu des réparations financières symboliques, estimées à plus de 18 millions de francs CFA.
Il a fallu 5 ans après le crime, et 10 mois après l’arrêt de la Chambre d’appel de la CPS sur les intérêts des parties civiles pour que les victimes entrent en possession de leurs dus. « Le SAVD [le Service d’aide aux victimes et à la défense de la CPS] a remis les réparations prononcées par la chambre d’appel aux parties civiles, soit 9 victimes directes des crimes (dont 5 victimes de violences sexuelles) et aux 32 familles affectées par l’attaque des villages de Lemouna et Koundjili le 21 mai 2019. », mentionne le communiqué de la Cour qui indique aussi que l’ensemble des réparations financières accordées, individuelles et collectives, remises le 31 août 2024, s’élève à un montant de 18.855.000 francs CFA. Les victimes des violences sexuelles, en plus des réparations financières, bénéficient d’une prise en charge du Projet Nengo, un programme qui offre un appui psychosocial aux victimes de violences sexuelles.
« Pour la première fois dans l’histoire de la République centrafricaine, une mesure de réparation ordonnée par une juridiction a été mise en œuvre au bénéfice direct des victimes parties civiles. », s’est réjouie la Cour.
Une réparation insuffisante, mais symbolique
Dans l’arrêt de la Chambre d’appel du 23 octobre 2023, la CPS a retenu 32 ayants-droits, représentant les 32 personnes tuées dans le massacre de Koundjili et Lemouna, et a fixé la somme de 350.000 pour chaque ayant-droit.
Le montant affecté à deux victimes de viol, mineures au moment des faits, est 1 million pour chacune et 700.000 francs pour les quatre autres victimes de violences sexuelles. La Chambre d’appel de la CPS a fixé les autres réparations financières à 600.000 pour chacun des trois survivants de tentatives de meurtre, et 200.000 pour un jeune homme ligoté durant l’attaque de son village.
Sur le terrain à Paoua, Simplice Bissi, un des ayant-droits confirme la réception d’une somme de 350.000 francs, versée comme dommage et intérêt après la mort de son frère dans le drame de Koundjili. « En fin la promesse de la CPS s’est concrétisée. Nous les ayant-droits avons reçu 350.000 francs par famille. Je remercie la Cour pour ce geste… mais mon défunt grand frère a laissé avec moi une vingtaine d’enfants. Leur scolarité seulement dépasse les 350.000 francs », dit-il, reconnaissant, mais plaintif. Simplice Bissi suggère que l’argent proposé pour la construction d’un mémorial en mémoire des victimes du massacre du 21 mai soit réorienté vers les victimes et ayant-droits, car ce projet a été rejeté par les victimes.
Les préjudices causés aux victimes devraient normalement être réparés par les personnes condamnées dans cette affaire de Paoua, notamment Issa Sallet Adoum, Yaouba Ousman et Mahamat Tahir, auteurs de massacre d’une trentaine de civils dans les villages Koundjili et Lemouna. Mais ces condamnés étant indigents selon les investigations de la CPS, la mise en œuvre de ces mesures de réparations est donc assurée par le Service d’aide aux victimes et à la défense de la CPS. Cette première réparation est financée par les Etats-Unis sur un montant de 30.000 dollars, soit un peu plus de 18 millions de francs CFA.
Pour Charles Mugaruka Mupenda, chef du Service d’aide aux victimes et à la défense (SAVD) de la CPS, une première étape est faite. Il compte sur la contribution financière des partenaires de la CPS pour pouvoir être en mesure de répondre à d’éventuelles mesures de réparations.
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